Amyotrophie Spinale : plus d’intelligence pour compenser les capacités motrices altérées ?

Par |Publié le : 17 janvier 2019|Dernière mise à jour : 14 août 2024|4 min de lecture|

L’amyotrophie spinale est une maladie génétique touchant près de 2500 personnes en France. Chez les adultes, la mutation génétique entraine une faiblesse et une atrophie des muscles touchant principalement les membres inférieurs. Une nouvelle étude, menée par le Docteur Pradat de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, montre que ces patients compenseraient la perte de leur mobilité par un gain de neurones dans différentes parties du cerveau, dont celles impliquées dans l’intelligence. Eclairage.

Un homme brillant atteint d'amyotrophie spinale

Des zones cérébrales plus denses en neurones

Dans la version adulte de la maladie, moins sévère que la version infantile, les patients ont une espérance de vie normale, mais perdent peu à peu leur mobilité. Ce sont les cellules nerveuses qui commandent les muscles (motoneurones) qui perdent peu à peu leurs fonctionnalités. Cependant, les capacités intellectuelles sont totalement préservées.

Dans cette étude, l’équipe de neurobiologistes a fait participer 25 patients adultes atteints par le type III et IV de l’amyotrophie spinale et 25 personnes saines.

À savoir ! L’amyotrophie spinale proximale, peut être classée selon quatre types différents (deux types infantiles, un type juvénile et un type de l’adulte). Le type III, ou maladie de Kugelberg-Welander, survenant après l’âge d’acquisition de la marche (après 18 mois – 2 ans) et le type IV se manifestant à l’âge adulte.

En explorant leurs cerveaux et leur moelle épinière avec une Imagerie par Résonnance Magnétique à haute résolution, les chercheurs ont découvert que la densité de substance grise (substance cérébrale contenant le corps des neurones par opposition à la substance blanche dans laquelle se situent les axones, les prolongements des neurones assurant la connexion interneuronale) dans le cerveau des sujets malades était plus dense dans le cortex moteur. La zone du cerveau responsable du mouvement.

D’après le Dr Pradat, qui s’est confié aux journalistes de Sciences et Avenir cette observation est logique : « cela pourrait signifier que les malades sont plus performants que les sujets sains dans le « pré-mouvement ».

À savoir ! Le prémouvement est le moment où les hypothèses de mouvement sont élaborées par le cerveau et prennent place dans les muscles.

Une autre zone du cerveau est apparue également sur les images plus denses en neurones chez les malades : les régions frontales responsables notamment des fonctions cognitives supérieures comme l’intelligence et les interactions sociales.

Pour le Dr Pradat, ce ne serait pas surprenant. « C’est ce que constatent les pédiatres sur les jeunes malades d’amyotrophie spinale. Ce sont souvent des enfants particulièrement brillants, aux facultés de langage supérieures à la moyenne ».

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Un nouveau regard sur le handicap

Finalement, les chercheurs ont montré que les formes adultes de la maladie sont associées à une dégénérescence sélective de la substance grise dans la moelle épinière avec une intégrité préservée de la substance blanche.

Et en même temps, dans le cortex moteur et les régions frontales, ils ont pu observer une augmentation de la densité de matière grise pouvant être assimilée à une réorganisation adaptative.

Cette découverte, qui devra être validée par des études cliniques incluant un plus grand nombre de patients, vient mettre en lumière une facette jusqu’ici mal connue des maladies touchant le système musculaire.

Une déficience physique pourrait être compensée par le développement d’autres compétences, et notamment intellectuelles, et ceci grâce à la plasticité cérébrale. Autrement dit, la faculté de notre cerveau à s’adapter aux contraintes en se réorganisant.

En identifiant précisément ces potentialités exceptionnelles, il serait intéressant d’utiliser ces données pour valoriser davantage les patients souffrant d’un handicap et de les intégrer encore mieux dans nos sociétés.

Prochainement, les chercheurs vont recommencer cette étude sur un plus grand nombre et tester cette réorganisation adaptative sur d’autres maladies impliquant une perte lente de la motricité, comme les différentes myopathies.

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Julie P., Journaliste scientifique

– Handicap et plasticité neuronale : la perte de motricité pourrait augmenter les capacités intellectuelles. Sciences et Avenir. C.Gaubert. Consulté le 21 décembre 2018.
– The spinal and cerebral profile of adult spinal-muscular atrophy: A multimodal imaging study. Neuroimage Clinical. G.Querin et al. Consulté le 20 décembre 2018.

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Julie P.
Journaliste scientifique
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