Apnées du sommeil dès la quarantaine : un risque plus élevé de pathologies tumorales ?
Le syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) ou apnée du sommeil est une maladie chronique nocturne qui touche 5% à 10% des adultes dans le monde. De récentes études sur le modèle animal ou chez l’homme ont montré que les patients souffrant de manque d’oxygène par intermittence pendant le sommeil avaient un risque augmenté de mortalité globale, mais aussi, une surmortalité par cancer. Pour aller plus loin, une équipe de chercheurs israéliens a mené une étude longitudinale sur 5000 patients atteints d’apnées du sommeil. Focus sur les résultats de cette étude parue dans la revue Respiration.
Un lien entre apnées du sommeil et risque élevé de cancer
Pour mener à bien leur étude, les chercheurs dirigés par Nir Peled de l’institut du cancer de l’université Ben-Gurion à Beer-Sheva, ont suivi, pendant six ans, 5243 patients âgés de plus de 18 ans et souffrant d’apnées du sommeil.
Pour commencer, les patients ont été soumis à un enregistrement polysomnographique du sommeil permettant de diagnostiquer leur SAHOS et d’évaluer sa sévérité en fonction de l’index d’apnées et d’hypopnées (IAH).
À savoir ! La polysomnographie enregistre plusieurs paramètres physiologiques tels que l’activité cérébrale, l’activité cardiaque, l’activité musculaire ou encore les mouvements des globes oculaires. Elle permet de confirmer la gravité de l’apnée du sommeil en déterminant les stades du sommeil ainsi que le nombre, la durée et la gravité des apnées. Le niveau de sévérité de l’apnée du sommeil se mesure au nombre d’apnées/hypopnées par heure de sommeil (IAH ou indice d’apnées/hypopnées).
Au terme des 6 ans de l’étude, une analyse statistique a permis de mettre en évidence que les sujets ayant moins de 45 ans et souffrant d’un indice d’apnées/hypoapnées supérieur à 57 (diagnostic d’une apnée du sommeil sévère) avaient un risque trois à quatre fois plus élevé de développer un cancer que des personnes du même âge et ne souffrant pas d’apnées du sommeil.
Ces chiffres viennent d’ailleurs confirmer de précédents résultats cliniques portant sur une cohorte de 1500 personnes suivies pendant 22 années par une équipe de chercheurs de l’université du Wisconsin.
Ici, les chercheurs avaient montré une relation dose-réponse c’est-à-dire que plus l’indice d’apnées et hypopnées (IAH) était haut, plus le risque de mortalité par cancer était élevé. Ainsi, avec un IAH supérieur à 30, le risque relatif de mortalité par cancer était multiplié par 4.8.
Parmi les 5 243 patients de la cohorte, 265 cancers ont été diagnostiqués pendant l’étude.
Les cancers les plus fréquents étaient le cancer de la prostate (14,7 %), du sang (12,8 %), le cancer urothélial (9,4 %) ou colorectal (9 %) et le cancer du sein (8,3 %).
Cette étude longitudinale prouve, une fois de plus, une association entre SAOS et cancer. Des études complémentaires sont nécessaires pour confirmer cette hypothèse et comprendre quels sont les mécanismes biologiques pouvant expliquer ce lien.
À savoir ! Des études ont montré que les épisodes d’hypoxie (quantité insuffisante d’oxygène dans l’organisme) sont à l’origine de la libération de facteurs de croissance vasculaire (molécules proangiogéniques) impliqués dans la survenue de certains cancers.
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Profil des personnes souffrant d’apnées du sommeil et perspectives de l’étude
Deux facteurs principaux favorisent la survenue du syndrome d’apnées du sommeil : l’âge et le surpoids ou l’obésité.
En France, sont touchés par les apnées du sommeil :
- 7,9 % des personnes âgées de 20 à 44 ans ;
- 9,7 % des personnes âgées de 45 à-64 ans ;
- 30,5 % des personnes de plus de 65 ans.
La maladie chronique est retrouvée deux fois plus fréquemment chez les hommes que chez les femmes. Avec la prévalence de plus en plus importante du surpoids et de l’obésité, les patients souffrant d’apnées du sommeil sont de plus en plus jeunes.
Selon une étude de Santé Publique France réalisée en 2012, les apnées du sommeil sont fréquentes et sous explorées en France.
A ce stade, d’autres études sont nécessaires pour confirmer l’association entre l’apnée du sommeil sévère et un risque aggravé de développer une pathologie tumorale.
Si ce lien est confirmé, il sera alors nécessaire de décrypter la relation de cause à effet et de trouver des applications thérapeutiques pour faire diminuer ce risque.
En attendant les résultats de ces futures investigations, les chercheurs recommandent de diagnostiquer rapidement les personnes souffrant d’apnées du sommeil et de suivre attentivement leur état de santé, car ils constituent une population plus susceptible de développer un cancer.
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Julie P., Journaliste scientifique
– Increased risk for cancer in young patients with severe obstructive sleep apnea. Respiration. Brenner R. et al. Consulté le 8 janvier 2019.
– Apnée du sommeil. Dossier d’information. INSERM. Consulté le 8 janvier 2019.
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