Risque accru de cancer de la peau avec un médicament contre l’hypertension artérielle ?!
L’hypertension artérielle constitue le premier facteur de risque cardiovasculaire et concerne près de 15 millions de personnes en France. Sa prise en charge repose sur des mesures hygiéno-diététiques et sur un traitement médicamenteux par un ou plusieurs antihypertenseurs. Mais une récente étude révèle qu’un médicament antihypertenseur courant serait associé à un risque accru de cancer cutané.
Hypertension artérielle et médicaments antihypertenseurs
Outre les mesures hygiéno-diététiques, la prise en charge de l’hypertension artérielle se base sur des médicaments spécifiques, les antihypertenseurs. En fonction de leur mécanisme d’action, les spécialistes distinguent actuellement 8 catégories de médicaments :
- Les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine (ARAII) agissent contre l’angiotensine, responsable de la contraction des artères à l’origine de l’hypertension artérielle.
- Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) agissent à la fois sur le système artériel et sur le cœur. Ils sont également prescrits contre l’insuffisance cardiaque.
- Les inhibiteurs de la rénine (IDR) bloquent la sécrétion rénale de rénine, qui favorise la contraction des artères.
- Les béta-bloquants réduisent la fréquence et l’intensité des battements cardiaques.
- Les diurétiques thiazidiques et apparentés agissent sur le rein et sont généralement prescrits en association avec un autre antihypertenseur.
- Les antagonistes calciques assouplissent les artères et sont également actifs contre l’angine de poitrine.
- Les antihypertenseurs centraux agissent sur le contrôle cérébral de la tension.
- Les alpha-bloquants agissent directement sur les artères pour réduire la tension artérielle.
Selon le cas spécifique de chaque patient, le médecin peut prescrire un seul médicament antihypertenseur ou plusieurs issus de catégories différentes, car ces médicaments peuvent avoir des effets complémentaires.
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Un médicament antihypertenseur associé à un risque accru de cancer
Tous les médicaments antihypertenseurs présentent un certain nombre d’effets indésirables (hypotension artérielle, toux, œdèmes des chevilles, vertiges, …), variables selon les médicaments et selon les patients. Mais ces traitements sont indispensables pour réguler la tension artérielle et limiter les risques cardiovasculaires associés à une tension artérielle trop élevée.
Parmi les diurétiques thiazidiques, l’hydrochlorothiazide est très fréquemment prescrit, toujours en association avec un autre médicament antihypertenseur. Récemment, une étude danoise s’est intéressée au lien entre ce médicament et le risque de développer certains cancers de la peau. Les résultats de cette étude viennent d’être publiés dans la revue scientifique Journal of the American Academy of Dermatology.
De précédentes études avaient déjà indiqué que l’hydrochlorothiazide était une substance photosensibilisante (qui augmente la sensibilité aux rayonnements UV) et associée à un risque accru de cancer des lèvres.
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs danois ont analysé 71 533 cas de carcinomes basocellulaires et 8 269 cas de carcinomes épidermoïdes, diagnostiqués entre 2004 et 2012. Ils ont été comparés respectivement 1 430 880 et 172 460 cas contrôles.
À savoir ! Les carcinomes basocellulaires et les carcinomes épidermoïdes sont deux formes de cancers cutanés, qui se développent à partir des cellules de l’épiderme. Les carcinomes basocellulaires sont les cancers de la peau les plus fréquents.
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La priorité : se protéger des UV
Les résultats de l’étude révèlent qu’une longue exposition (environ 6 ans) à l’hydrochlorothiazide est associée à une augmentation de 29 % du risque de carcinome basocellulaire et une multiplication par quatre du risque de carcinome épidermoïde. Pour une exposition sur 24 ans, le sur-risque s’élève à 54 % pour le carcinome basocellulaire et à une multiplication par 7 pour le carcinome épidermoïde.
Les chercheurs soulignent que ces résultats ne permettent pas de conclure à un lien de causalité entre le traitement antihypertenseur et la survenue du cancer cutané, d’autant plus que l’exposition aux UV et le type de peau n’ont pas été considérés dans l’étude.
En revanche, cette étude souligne la nécessité absolue de se protéger du soleil (avec des crèmes solaires d’indice de protection d’au moins 30) tout au long du traitement par l’hydrochlorothiazide. De plus, les cabines à UV sont fortement déconseillées chez ces patients. Ce médicament antihypertenseur peut également être remplacé par un autre chez certaines personnes à risque élevé de cancers de la peau :
- Les personnes très exposées au soleil, notamment en milieu professionnel ;
- Les personnes ayant des antécédents de cancers cutanés ;
- Les personnes prédisposées aux cancers de la peau.
Selon les auteurs, cette étude ne remet aucunement en cause l’intérêt thérapeutique de l’hydrochlorothiazide dans le traitement de l’hypertension artérielle, à condition d’opter pour une bonne protection solaire !
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Estelle B., Docteur en Pharmacie
– Hydrochlorothiazide use and risk of non-melanoma skin cancer: A nationwide case-control study from Denmark. Pottegård, A. and al. 2017. J Am Acad Dermatol. pii: S0190-9622(17)32741-X.
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