Un champignon impliqué dans la cirrhose alcoolique ?!

Par |Publié le : 13 juin 2017|Dernière mise à jour : 14 août 2024|4 min de lecture|

Responsable de près de 15 000 décès chaque année en France, la cirrhose du foie est principalement due à une consommation abusive d’alcool. Selon une récente étude, l’excès d’alcool pourrait favoriser le développement d’un champignon intestinal, qui aggraverait la maladie. Cette découverte pourrait ouvrir la voie à une nouvelle piste thérapeutique pour les patients atteints de cirrhose alcoolique.

Cirrhose alcoolique

Alcool et cirrhose hépatique

La cirrhose hépatique est une maladie du foie, dont les conséquences sont graves :

  1. Une perte des fonctions physiologiques du foie (filtration des substances contenues dans le sang, sécrétion de la bile) ;
  2. Une hypertension portale (augmentation de la pression dans le système veineux qui conduit le sang de l’appareil digestif au foie), à l’origine de la formation de varices œsophagiennes capables de provoquer des hémorragies ;
  3. Un cancer du foie dans les 15 à 20 ans qui suivent l’apparition de la cirrhose.

Dans 50 à 75 % des cas, la consommation excessive et prolongée d’alcool est la cause de cette maladie, dont les dégâts sur le foie sont irréversibles. Selon les patients, la maladie peut stagner ou évoluer, mais une fois installée, elle est définitive.

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Un champignon impliqué dans la cirrhose ?

Récemment, une étude américaine suggère que l’existence d’une infection fongique (due à un champignon microscopique) pourrait aggraver la cirrhose alcoolique. De précédentes études avaient déjà mis en évidence que la consommation d’alcool entraînait un changement de la flore bactérienne intestinale, avec un effet délétère sur l’évolution de la maladie hépatique.

Les chercheurs ont cette fois montré que des champignons microscopiques se développent dans l’appareil digestif de souris exposées à l’alcool. Ces champignons produisent notamment des glucides spécifiques, appelés des béta-glucanes, qui migreraient vers le foie, où ils provoqueraient une inflammation chronique. Cet état inflammatoire aggraverait la cirrhose hépatique.

Dans un second temps, les chercheurs ont comparé la composition fécale de 8 personnes en bonne santé et de 20 sujets atteints de cirrhose alcoolique. Les résultats montrent que les sujets malades présentent moins d’espèces de champignons que les sujets sains, mais que les champignons de type Candida prédominent largement, et ce quel que soit le degré de sévérité de la maladie.

Par ailleurs, dans un groupe de 27 patients atteints de cirrhose hépatique, il existe une corrélation entre la sévérité de la maladie et la quantité de champignons présents dans les selles. Plus l’exposition aux champignons est forte, plus le risque de mortalité augmente. Ainsi, après 5 ans d’évolution de la maladie, 77 % des patients peu exposés étaient en vie, contre seulement 36 % dans le groupe fortement exposé.

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Vers une nouvelle piste thérapeutique…

La prise en charge actuelle de la cirrhose hépatique cible à la fois la cause de la maladie et les éventuelles complications qui en découlent. Dans les cas où la maladie est liée à une consommation excessive d’alcool, l’arrêt définitif et total d’alcool est impératif. Les complications sont prises en charge au cas par cas, en fonction de l’état de santé de chaque patient. Une greffe de foie (transplantation hépatique) peut être envisagée, notamment dans deux contextes cliniques :

  1. Une cirrhose résistante à tous les traitements médicaux utilisés ;
  2. Un cancer du foie.

Selon les résultats de l’étude, l’implication d’un champignon dans l’évolution et l’aggravation de la cirrhose pourrait permettre d’envisager une nouvelle thérapeutique. Les chercheurs ont testé l’effet d’un médicament antifongique oral, l’amphotéricine B, sur des souris atteintes de cirrhose alcoolique. Par rapport au groupe de souris non traitées, les souris traitées présentaient un niveau d’atteinte hépatique plus faible (réduction d’environ 55 % du taux d’ALAT, enzyme révélatrice d’une destruction du foie) et une plus faible accumulation de graisses (réduction d’environ 21 % des triglycérides).

Même si des études complémentaires à grande échelle restent nécessaires pour valider ces résultats, les auteurs de l’étude souhaiteraient pouvoir tester l’effet de l’amphotéricine B chez les patients atteints de cirrhose alcoolique, qui ont besoin en urgence de nouveaux traitements.

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Estelle B., Docteur en Pharmacie

– Cirrhose du foie. AMELI Santé. Le 10 mars 2017.
– Intestinal fungi contribute to development of alcoholic liver disease.The Journal of Clinical Investigation. Yang, An-Ming, T. and al. 2017.

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Estelle B.
Pharmacienne
Pharmacienne Spécialiste de l'information médicale et de l'éducation thérapeutique du patient. Passionnée par les domaines de la santé et de l'environnement marin. Rédige un contenu scientifique fiable avec des sources vérifiées en respect de notre charte HIC.