Corticoïdes sur quelques jours : attention aux effets secondaires
En France, selon les estimations, 0,75 % de la population est traitée par des corticoïdes au long cours pour diverses indications, un chiffre passant à 2,5 % chez les plus de 65 ans. Si ces médicaments sont de puissants antiinflammatoires, ils sont également associés à des effets secondaires parfois importants. Des effets secondaires qui ne sont pas réservés aux traitements au long cours, mais qu’il est possible de prévenir et de surveiller pour poursuivre le traitement en toute sécurité.
Cortisol, cortisone et corticoïdes
Dans l’organisme, est produite par les glandes surrénales une hormone, souvent appelée l’hormone du stress, le cortisol ou hydrocortisone. Cette hormone stéroïde exerce différentes fonctions physiologiques au sein de l’organisme :
- L’augmentation de la glycémie par le biais de la néoglucogenèse ;
- L’inhibition de certaines réponses du système immunitaire ;
- La régulation du métabolisme des lipides, des protéines et des glucides ;
- La régulation du rythme circadien (en complément de la mélatonine, l’hormone du sommeil).
Certaines pathologies sont associées à un déficit en cortisol (insuffisance surrénalienne) ou à une hypersécrétion de cortisol (syndrome de Cushing). En prenant le cortisol pour modèle, des médicaments corticoïdes ont été développés, comme la cortisone, la prednisolone, la bétaméthasone ou encore la prednisone. Ces corticoïdes, également appelés des corticostéroïdes, sont des antiinflammatoires puissants, mais aussi des anti-allergiques et des immunosuppresseurs, indiqués dans le traitement de nombreuses pathologies aiguës ou chroniques :
- Des états inflammatoires aigus, comme un mal de gorge, une arthrite ou une sinusite ;
- Des maladies auto-immunes, comme la polyarthrite rhumatoïde et la sclérose en plaques ;
- Des maladies dermatologiques, comme l’eczéma ou la dermatite atopique ou le psoriasis ;
- Des cancers ou des complications liées à certains cancers, par exemple dans les leucémies aiguës ;
- L’asthme ou la BPCO (BronchoPneumopathie Chronique Obstructive) ;
- Des réactions allergiques graves.
La cortisone fait effet au bout de combien de temps ?
Selon les situations, les traitements par des médicaments corticoïdes sont brefs (quelques jours) ou longs (parfois plusieurs mois) et ces médicaments peuvent être administrés selon différents modes :
- La voie veineuse ;
- La voie intramusculaire ;
- La voie intra-articulaire ;
- La voie orale ;
- La voie topique (crème et pommade appliquées sur la peau) ;
- La voie inhalée.
En fonction de la voie d’administration, du type de corticoïde et de l’indication du médicament, l’effet thérapeutique est observé plus ou moins rapidement. Une injection intraveineuse en cas de réaction allergique sévère permet un effet des corticoïdes en seulement quelques minutes. Pour d’autres indications, il faut parfois attendre plusieurs jours pour percevoir une amélioration des symptômes.
Corticoïdes et effets secondaires
Les corticoïdes, ou anti-inflammatoires stéroïdiens, exercent une puissante action anti-inflammatoire, mais ils sont également à l’origine de nombreux effets secondaires. La fréquence et l’importance de ces effets indésirables dépend de plusieurs facteurs :
- La posologie des médicaments ;
- La durée du traitement ;
- La nature du corticoïde (certains donnent plus d’effets secondaires que d’autres) ;
- La voie d’administration (orale, inhalée, injectée, …) ;
- La sensibilité individuelle aux corticoïdes ;
- L’état de santé du patient.
Les principaux effets secondaires observés avec les corticoïdes sont les suivants :
- Une prise de poids localisée au niveau du visage et du tronc ;
- Des troubles sanguins : baisse du taux de potassium ;
- Une rétention d’eau et de sel, entraînant des œdèmes et une augmentation de la tension artérielle;
- Une stimulation de l’appétit ;
- Une intolérance au glucose pouvant révéler ou accentuer un diabète ;
- Une augmentation des taux sanguins de lipides ;
- Des troubles cutanés avec entre autres une fragilité de la peau et des capillaires, une acné, des vergetures ou des problèmes de cicatrisation ;
- Une faiblesse musculaire, notamment au niveau des jambes ;
- Une perte de masse osseuse avec un risque marqué d’ostéoporose ;
- Un retard de croissance chez l’enfant ;
- Des troubles sexuels (troubles du cycle menstruel, impuissance) ;
- Des troubles digestifs (acidité gastrique) ;
- Une immunodépression ;
- Des troubles du sommeil et des troubles psychiques (dépression, délire, hallucinations) ;
- Des complications oculaires, de type cataracte, voire de glaucome chez certaines personnes prédisposées.
Ces effets secondaires sont le plus souvent observés lors des corticothérapies à fortes doses et/ou sur des durées prolongées. Ils font l’objet d’une surveillance et différentes mesures de prévention permettent le plus souvent de les réduire voire de les éviter. Les corticoïdes inhalés et les corticoïdes topiques (appliqués sur la peau) sont généralement associés à moins d’effets secondaires que les corticoïdes administrés par voie orale, par voie intraveineuse ou par injection. Mais à nouveau tout dépend des doses ! Il faut également savoir qu’il est rare qu’une personne ressente tous les effets secondaires des corticoïdes. Généralement seulement un ou deux effets se manifestent.
Pourquoi prendre les comprimés de corticoïdes le matin ?
Dans les états inflammatoires aigus, qui justifient un traitement corticoïde sur quelques jours, il est conseillé de prendre les comprimés le matin. Pourquoi cette précaution ? La prise des comprimés le matin permet d’éviter l’effet des corticoïdes sur le sommeil. En effet, les corticoïdes sont des dérivés de la cortisone, qui est une hormone stimulante. La prise des corticoïdes plus tard au cours de la journée peut compliquer l’endormissement le soir.
Des risques même sur de courtes périodes
Si les complications des corticothérapies au long cours sont bien décrites, les effets indésirables des traitements de courte durée sont moins connus. Or les corticoïdes sont très fréquemment prescrits sur des périodes brèves de quelques jours seulement.
Pour déterminer les effets collatéraux à court terme de ces traitements, des chercheurs américains ont analysé en 2017 une base de données, collectée par les assureurs et les pharmaciens. Tous les adultes âgés de 18 à 64 ans, traités par des corticoïdes oraux, pendant une période inférieure à 30 jours, ont été inclus dans l’étude.
Trois grands types d’effets indésirables des corticoïdes ont été pris en compte : les fractures, les accidents thromboemboliques veineux (accidents cardiovasculaires) et les sepsis (infections généralisées). Sur plus de 1 500 000 patients étudiés, 21,1 % ont eu une prescription brève de corticoïdes, d’une durée moyenne de 6 jours, avec une posologie moyenne de 20 mg par jour en équivalent prednisolone (l’un des corticoïdes les plus prescrits). Les indications thérapeutiques les plus fréquentes étaient les infections des voies respiratoires hautes (sinusite par exemple), les douleurs vertébrales et les allergies.
Sur l’ensemble des personnes traitées brièvement par des corticoïdes, les chercheurs ont recensé 21 % de fractures, 5 % d’accidents thromboemboliques veineux et 2 % de sepsis. Ces pourcentages sont significativement supérieurs à ceux observés chez les personnes non traitées. Les hospitalisations pour ces effets indésirables ont été significativement plus fréquentes chez les personnes traitées.
Même si cette étude n’a pris en compte que certains effets indésirables, il apparaît que même des traitements brefs peuvent être à l’origine de complications graves nécessitant une hospitalisation. Les auteurs concluent sur l’importance de respecter scrupuleusement les recommandations de prescription et d’usage des corticoïdes pour prévenir les effets secondaires :
- Uniquement pour les indications thérapeutiques où les corticoïdes sont indispensables ;
- Aux doses les plus faibles possibles ;
- Sur une période la plus courte possible.
- Les mesures de prévention (par exemple un régime pauvre en sel et en sucre) et de surveillance (notamment la mesure régulière de la tension artérielle) s’imposent également dès les premiers jours de corticothérapie.
Combien de temps la cortisone reste dans le corps ?
Les corticoïdes une fois administrés restent plus ou moins longtemps dans l’organisme. Une fois transformés dans le corps, ils sont naturellement éliminés dans les urines. A titre d’exemple, la prednisone est totalement éliminée de l’organisme en 72 heures, mais certains corticoïdes peuvent persister pendant plusieurs semaines.
Dans tous les cas, lorsque le traitement par corticoïdes dure plus de 2 semaines, il ne faut pas les arrêter brutalement sous peine de voir repartir de plus belle la maladie. Le médecin programme une diminution progressive des posologies jusqu’à l’arrêt total pour éviter le rebond de la maladie et donc des symptômes.
Corticoïdes, c’est quoi la corticophobie ?
Les effets secondaires des corticoïdes sont à l’origine d’un phénomène de rejet ou de peur des corticoïdes appelé la corticophobie. La corticophobie désigne la peur d’utiliser des corticoïdes par voie orale, inhalée ou topique. Cette tendance n’est pas récente, puisqu’elle a été décrite pour la première fois en 1979 et reprise à maintes fois depuis.
La corticophobie ne concerne pas que les patients et leurs proches, les soignants sont aussi très souvent corticophobes. Selon les études, la corticophobie pourrait concerner 40 % à 80 % de la population de patients atopiques ou de familles d’enfants atopiques. Malheureusement, la corticophobie peut avoir des conséquences négatives sur la prise en charge et l’évolution de certaines maladies. Il est important de prescrire les corticoïdes pour les bonnes indications avec la bonne posologie et la bonne durée de traitement. Et pour les patients, il est important de respecter la prescription du médecin pour soulager au mieux les symptômes et prévenir leur récidive. Si la crainte des effets secondaires alimente la corticophobie, il faut en parler avec le médecin et le pharmacien, car des solutions existent pour réduire les risques et poursuivre son traitement en toute sécurité.
Face à l’inflammation aiguë et chronique, les corticoïdes sont souvent incontournables. Il est donc préférable de gérer les effets secondaires, plutôt que se priver de leur efficacité thérapeutique.
Mis à jour par Estelle B., Docteur en Pharmacie le 3 août 2023
– Les effets indésirables des corticoïdes. www.e-cancer.fr. Consulté le 3 août 2023.
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