Distilbène : 3 générations impactées
De 1950 à 1977, date de son interdiction, le Distilbène ou diéthylstilbestrol (DES) a été prescrit aux femmes enceintes pour éviter les fausses couches. Outre son inefficacité, ce médicament est responsable d’effets secondaires qui se répercutent sur les enfants et même petits-enfants des femmes traitées…
DES : un perturbateur endocrinien
Le Distilbène ou DES agit en perturbant les glandes productrices des hormones sexuelles ; il est à ce titre un des perturbateurs endocriniens les plus connus et les plus étudiés.
À savoir ! Un perturbateur endocrinien est une substance qui trouble le fonctionnement de nos glandes endocrines (c’est-à-dire les organes responsables de la production d’hormones, comme les ovaires ou les testicules). Il agit en bloquant ou imitant l’action des hormones.
À ce titre, le DES est responsable d’anomalies congénitales sur les filles exposées pendant la grossesse. Il s’agit essentiellement de malformations de l’utérus. À plus long terme, le DES est responsable de cancer de l’utérus et aussi d’une augmentation du risque du cancer du sein chez ces patientes.
Cependant, les effets secondaires de ce perturbateur endocrinien ne se font pas sentir que sur la génération des filles exposées in utero, mais aussi sur leurs frères, leur mère et leurs enfants…
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3 générations touchées par le Distilbène
Dans l’affaire du DES, on distingue 3 générations :
- La troisième génération ou « petits-enfants DES ». Ils sont âgés de moins de 50 ans. Bien qu’ils n’aient jamais été en contact direct avec le Distilbène, ils subissent les conséquences de l’exposition des 2 générations précédentes.
- La première génération : c’est-à-dire les mères traitées au DES (« mères DES ») entre 1950 et 1977. Cela concerne environ 200 000 femmes ;
- La deuxième génération : les filles et fils de mères DES, exposés in utero, ils ont aujourd’hui entre 40 et 65 ans. Ils sont 160 000.
Ce passage à la troisième génération est dû à un phénomène d’altération épigénétique : le DES induit des modifications dans l’expression des gènes qui se transmettent d’une génération à l’autre. À l’heure actuelle, les données ne sont pas disponibles pour la 4ème génération, mais le risque qu’elle soit aussi atteinte n’est pas exclu.
À savoir ! Si le Distilbène est de triste mémoire, toutes les familles exposées n’en subissent pas forcément les conséquences. Bon nombre ne développeront jamais aucun effet.
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Résultats des études sur les 3 générations DES
Des récentes études ont montré des effets secondaires quelque peu différents en fonction des générations. Certains effets sont avérés, d’autres sont seulement suspectés pour le moment.
Effets reconnus | Effets possibles | |
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Mère DES | • Légère augmentation de risque de cancer du sein (multiplié par 1.3) | |
Fille DES | • Malformation de l’utérus • Adénocarcinome (cancer) de l’utérus ou du vagin • Infertilité, fausse couche • Risque de cancer du sein multiplié par 2 • Augmentation des dépressions et des troubles du comportement alimentaire |
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Fils DES | • Augmentation des malformations génitales (cryptorchidie (testicules « non descendus »), hypospadias (orifice de l’urètre mal placé)) • Risque augmenté de développer un cancer du testicule • Risque d’infertilité augmenté |
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Petite-fille DES (issue de fille DES) | • Augmentation du risque d’infirmité moteur cérébrale, sans doute en relation avec des naissances prématurées | • Malformations cardiaques ? • Malformations de l’œsophage ? |
Petit-fils DES (issue de fille DES) | • Hypospadias et cryptorchidie • Augmentation du risque d’infirmité moteur cérébrale, sans doute en relation avec des naissances prématurées |
• Malformations cardiaques ? • Malformations de l’œsophage ? |
À l’heure actuelle, l’incidence des effets secondaires sur les enfants issus de Fils DES n’a pas pu être étudiée, du fait d’un nombre de cas trop faible.
Si, heureusement, toutes ces complications ne sont pas systématiques, médecins et patients doivent en être conscients afin d’observer un suivi médical optimal. Notamment, les dépistages et leur rythme d’application doivent être adaptés à cette population particulière, victime du DES.
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Isabelle V., journaliste scientifique
– Distilbène étude 3 générations – Réseau D.E.S France. – Consulté le 16 octobre 2017.
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