L’être humain évolue-t-il encore ?
En 1859, Charles Darwin évoquait sa fameuse théorie de l’évolution des espèces selon laquelle l’évolution est lente et progressive impliquant de minuscules changements génétiques s’étalant sur des dizaines de milliers d’années. Que vaut aujourd’hui cette théorie ? Les humains modernes évoluent-ils encore ?
L’évolution de l’espèce humaine fait débat
« L’Homme a stoppé l’évolution naturelle et a accéléré l’évolution culturelle »
En 2000, le paléontologue Stephen Jay Gould déclarait qu’ « il n’y a pas eu de changement biologique chez l’être humain depuis 40 000 voire 50 000 ans ». Il suggérait alors une évolution de l’Homme soit imperceptiblement lente, soit stoppée. David Attenborough, un autre spécialiste, était du même avis. Il affirmait même que le contrôle des naissances et l’avortement avaient sans nul doute contribué à l’arrêt de l’évolution des êtres humains. En 2013, ce dernier déclarait au magazine anglais The Radio Time que « nous avons stoppé la sélection naturelle depuis que nous sommes capables d’élever 90 à 95% de nos bébés nés. Nous sommes la seule espèce à avoir mis un terme à la sélection naturelle de notre plein gré ». Il ajoutait qu’« arrêter l’évolution naturelle n’est pas aussi important, ou déprimant, que cela puisse paraître parce que notre évolution est à présent culturelle ». Il suggérait ainsi que notre espèce a plutôt assuré sa survie en accélérant l’évolution culturelle. En effet, nous héritons maintenant de connaissances (par exemple des ordinateurs, de la télévision ou de l’électronique, etc.).
L’évolution culturelle n’a pas remplacé l’évolution physique
Le Dr Rickard de l’Université de Durham au Royaume-Uni met quant à lui au contraire l’accent sur la génétique. Il explique, en effet, dans The Guardian que « La sélection naturelle nécessite des variations. Elle a besoin de certaines personnes pour prospérer plus que d’autres. »
En 2010, Alan R Templeton rejette lui aussi la théorie d’Attenborough selon laquelle l’évolution culturelle a remplacé l’évolution physique. Il affirme que « tous les organismes s’adaptent à leur environnement, et les humains ne font pas exception à la règle. » Selon lui, l’évolution culturelle a conduit à une évolution adaptative chez l’homme. Il donne l’exemple des progrès dans le transport. Ces derniers ont en effet facilité un mélange rapide du patrimoine génétique dans le monde entraînant le déclin des différences entre les diverses populations. De ce déclin a découlé des effets bénéfiques pour la santé humaine.
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Une évolution de l’Homme 100 fois plus rapide
Gregory Cochran et Henry Harpending ont écrit un livre en 2009, « L’explosion de 10 000 ans : comment la civilisation accélérait l’évolution humaine ». Dans ce livre, ils expliquent, qu’au lieu de n’avoir subi aucune modification en 50 000 ans, l’évolution humaine se serait au contraire accélérée au cours des 10 000 dernières années. En effet, plutôt que de ralentir ou stopper, les auteurs affirment que l’évolution se produirait maintenant 100 fois plus vite qu’au cours des 6 millions d’années de notre existence.
Des preuves de la sélection naturelle grâce aux données génétiques
Scott Solomon, biologiste de l’Université du Texas, fait une remarque intéressante dans son livre intitulé « Future Humans : Inside the Science of Our Continuing Evolution ». Il indique que c’est en 2000 que Stephen Jay Gould déclare l’évolution humaine ralentie ou arrêtée. Or, il écrit qu’il était impossible de séquencer le génome humain à ce moment là. En effet, dans les 18 années qui ont suivi, il est devenu plus facile et moins coûteux de le faire. Cette accessibilité a permis aux scientifiques d’avoir un aperçu de l’évolution de l’Homme. Solomon explique qu’à partir de ces données, les chercheurs ont pu avoir des preuves que la sélection naturelle a bien impacté certains de nos gènes. Il mentionne notamment ceux impliqués dans la tolérance aux changements alimentaires ou à la protection contre les changements infectieux. Il y a également ceux impliqués dans la capacité à vivre dans des régions montagneuses où l’oxygène est plus rare. La sélection naturelle a aussi impacté les gènes impliqués dans la capacité à résister aux rayonnements UV du soleil.
La tolérance au lait : une preuve de l’évolution
L’un des exemples d’adaptation humaine le plus flagrant est l’évolution qui a conduit l’être humain a toléré le lait. En effet, il y a environ 11 000 ans, les humains étaient incapables de digérer le lactose (l’un des composants du lait). Les preuves de cette évolution sont encore visibles aujourd’hui. En effet, les individus issus de régions avec une tradition laitière ancienne (comme l’Europe) sont beaucoup plus tolérants au lactose dans l’alimentation que les personnes issues de région n’ayant pas d’héritage laitier (comme l’Asie). Ainsi, près de 90% des individus originaires d’Asie de l’Est souffrent d’intolérance au lactose, contre seulement 5% en Europe.
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Charline D., Docteur en pharmacie
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