Maladie de Huntington : l’oligonucléotide antisens donne des résultats cliniques très prometteurs !

Par |Publié le : 20 juin 2019|Dernière mise à jour : 14 août 2024|5 min de lecture|

Depuis plus de dix ans, des chercheurs travaillent sur la piste de l’oligonucléotide antisens pour contrer la maladie de Huntington. Le premier essai clinique réalisé sur 46 patients, et dirigé par des spécialistes de l’University College de Londres, montre que l’administration de cet ARN antisens permet de diminuer le taux de protéine huntingtine mutée dans le système nerveux central. Un essai clinique en phase 3 est en cours pour confirmer ces résultats.

Maladie de Huntington

Bloquer la huntingtine à tout prix grâce à la thérapie génique

La maladie de Huntington est causée par une mutation génétique du gène codant la protéine huntingtine. Cette protéine huntingtine défaillante entraîne une dégénérescence des neurones du cerveau. A partir de 30 ans, les symptômes apparaissent et le patient souffre de troubles moteurs, cognitifs et psychiatriques.

Aujourd’hui, les traitements permettent de soulager les symptômes, mais pas de ralentir la progression de la maladie ou de stopper sa survenue.

Depuis plus de 10 ans, et grâce à l’essor de la thérapie génique, les chercheurs ont développé un oligonucléotide antisens (OAS) qui va venir stopper, en partie, la synthèse de la protéine huntingtine mutée et nocive.

À savoir ! Un oligonucléotide antisens est un court fragment d’ADN (une vingtaine de nucléotides), qui peut être synthétisé chimiquement et possède naturellement la propriété de s’associer à un gène donné. Un oligonucléotide anti-sens à ARN est un fragment d’ARN, cette fois-ci, généralement synthétisé en laboratoire, qui peut se lier spécifiquement à un ARN messager naturel. L’oligonucléotide antisens a une séquence qui est complémentaire de l’ARN messager qu’il cible. En se fixant à ce dernier, il va bloquer sa traduction en protéine.

Pour mener à bien cet essai clinique de phase 1-2a, les chercheurs supervisés par la professeure Sarah Tabrizi et parrainés par Ionis Pharmaceuticals, ont recruté 46 malades diagnostiqués à un stade précoce de la maladie et âgés de 25 à 65 ans. Ces malades étaient répartis dans 9 centres en Allemagne, au Canada et au Royaume-Uni.

À savoir ! La phase 1 a pour but de vérifier la tolérance de l’organisme humain pour le médicament, et de comprendre divers paramètres pharmacologiques.  La phase II sert à déterminer la relation effet-dose du médicament.

Sur des 46 patients, 34 ont été choisis aléatoirement pour recevoir le médicament ARN-antisens (médicament IONIS-HTTRx et nommé maintenant RG6042) par voie intrathécale à des doses comprises entre 10 et 120 mg tous les mois. Les patients ont reçu quatre injections dans le liquide céphalorachidien (LCR) à des intervalles de 4 semaines, avec un suivi de 4 mois.

Les 12 autres patients ont reçu un placebo à la même fréquence

Le choix de la dose administrée a été guidé par un modèle préclinique associant les doses à la réduction de la huntingtine.

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Le HTTRx bloque la protéine huntingtine mutée

L’étude se déroulant d’août 2015 à novembre 2017 a montré que l’ARN anti-sens permettait de :

  • Ne pas développer d’évènements indésirables graves (validation de la sécurité du médicament) ;
  • Bloquer l’accumulation de la protéine défaillante dans les tissus du système nerveux central (mesurer grâce à la détection de la concentration de la huntingtine mutée dans le liquide céphalo-rachidien (LCR));
  • Freiner l’évolution des symptômes de la maladie.

Le traitement médicamenteux a entraîné une baisse de 38%, en moyenne, de la protéine défaillante pour les groupes recevant la dose la plus élevée.

Pour plus de précisions, le traitement a entraîné une réduction dose-dépendante de la concentration de huntingtine mutante dans le LCR comme suit :

  • Réduction de 10% de huntingtine dans le groupe placebo ;
  • De 20 % et 25 % dans les groupes recevant 10 mg et 30 mg de HTTRx ;
  • De 28% et 42% dans les groupes recevant 60 mg et 90 mg de HTTRx ;
  • De 38 % dans les groupes recevant 120 mg de HTTRx (avec un maximum de 63% pour un patient de ce groupe).

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Ce qu’il reste à faire

 « Nous sommes ravis d’aller de l’avant pour un essai mondial de phase 3 sponsorisé par F. Hoffmann-La Roche, qui a autorisé le médicament, afin de déterminer si un traitement antisens intrathécal régulier ralentit la progression clinique de la maladie. C’est un moment important dans la recherche clinique pour les patients et leurs familles atteints de la maladie de Huntington et nous travaillons de concert avec la communauté internationale pour aider à la réalisation de cet essai « a déclaré Sarah Tabrizi dans un communiqué de presse de l’UCL.

Dans le prolongement de cette étude, et avec les mêmes participants, les chercheurs évaluent les effets cliniques d’une administration intrathécale de 120 mg de HTTRX chaque mois.

De plus, un essai clinique en phase 3 (numéro ClinicalTrials.gov, NCT03761849) est en cours pour suivre 660 patients à travers le monde pendant 2 ans.

Désormais, les chercheurs doivent comprendre dans quelles mesures la baisse de la protéine huntingtine mutée dans le système nerveux central agit sur l’évolution de la maladie.

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Julie P. Journaliste scientifique

– Targeting Huntingtin Expression in Patients with Huntington’s Disease. NEJM. S.J. Tabrizi et al. Consulté le 18 juin 2019.
Oligonucleotide Treatment for Huntington’s Disease-Edito. NEJM. K.H.Fischbeck et N.S.Wexler. Consulté le 18 juin 2019.

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Julie P.
Journaliste scientifique
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