Le pharmacien contre les prescriptions inappropriées chez les séniors
Les prescriptions médicales inappropriées chez les personnes âgées sont à l’origine de conséquences parfois graves, comme des effets indésirables ou des hospitalisations. Face à ce constat, des chercheurs canadiens ont évalué l’intérêt d’une intervention éducative du pharmacien. Leurs résultats suggèrent que ce professionnel de santé représente un acteur clé pour limiter et prévenir de telles prescriptions et leurs conséquences.
Des prescriptions médicales inappropriées encore trop nombreuses
Les personnes âgées prennent souvent régulièrement plusieurs types de médicaments pour différents problèmes de santé. Cette polymédication peut parfois être à l’origine de prescriptions médicales inappropriées, par exemple au moment d’un retour à domicile après une hospitalisation ou encore lorsque le patient consulte simultanément plusieurs médecins. De telles prescriptions peuvent avoir des conséquences plus ou moins graves pour les séniors :
- Une dégradation ou une aggravation de leur état de santé ;
- L’apparition d’effets indésirables médicamenteux ;
- Un risque d’interactions médicamenteuses ;
- Une hospitalisation en urgence.
Les prescriptions médicales inappropriées constituent donc un enjeu de santé publique pour les séniors. L’objectif est de réduire ou de supprimer les médicaments qui ne sont plus indispensables ou qui peuvent s’avérer dangereux pour la personne âgée.
Dans ce contexte, des chercheurs québécois ont comparé l’efficacité d’une intervention éducative menée par le pharmacien et celle de la prise en charge habituelle, dans un essai clinique mené entre février 2014 et septembre 2017, dans 69 pharmacies de ville du Québec. Les patients inclus dans l’étude étaient tous âgés d’au moins 65 ans, avec un âge moyen d’environ 75 ans.
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Sensibiliser les patients … mais aussi les médecins !
L’intervention éducative du pharmacien comprenait deux aspects essentiels et complémentaires :
- La remise d’une brochure d’information au patient sur les prescriptions inappropriées;
- L’envoi au médecin de supports de communication présentant l’intérêt de réduire les prescriptions inappropriées. A noter qu’au Québec, le pharmacien et le médecin peuvent échanger à propos du cas de certains patients pour optimiser leur prise en charge.
Au total, 437 patients ont participé à l’étude. Au moment du renouvellement de prescription à 6 mois, 43 % des patients ayant bénéficié d’une intervention éducative pharmaceutique n’avaient plus de prescriptions inappropriées, contre seulement 12 % des patients ayant eu la prise en charge habituelle. L’arrêt des quatre médicaments inappropriés ciblés dans l’étude (sédatifs/hypnotiques, glibenclamide, anti-inflammatoires non stéroïdiens, antihistaminiques) n’a donné lieu à aucun évènement indésirable grave. En revanche, 38 % des personnes âgées ayant tenté de réduire progressivement les sédatifs/hypnotiques ont déclaré ressentir des symptômes de sevrage.
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Une coopération médecin – pharmacien pour le bien du patient
L’intervention pharmaceutique auprès des personnes âgées et des médecins prescripteurs a ainsi permis de réduire de 31 % le risque de prescription inappropriée. De tels résultats semblent prometteurs, mais des études complémentaires sont désormais nécessaires pour déterminer si l’intervention du pharmacien influence significativement :
- L’arrêt des médicaments inappropriés pris en compte avant ou après 6 mois ;
- L’arrêt d’autres médicaments inappropriés non pris en compte dans cette étude ;
- La réduction des prescriptions inappropriées dans d’autres contextes (patients plus jeunes, patients en institution, …).
Néanmoins, cette étude souligne d’ores et déjà le rôle clé du pharmacien d’officine dans la prévention et le repérage des prescriptions inappropriées et de leurs conséquences pour le patient. Une démonstration de l’efficacité de la coopération médecin – pharmacien au Québec !
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Estelle B. / Docteur en Pharmacie
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