Rhumatisme psoriasique : avis d’un médecin expert
Le 27 octobre 2016, le Pr Pascal Claudepierre Rhumatologue au sein du Service de Rhumatologie du Groupe Henri-Mondor Albert Chenevier, décrypte la problématique qui entoure le rhumatisme psoriasique. Sont mis en avant au cours de cet échange : l’importance d’informer le patient psoriasique, que toute douleur articulaire doit être rapportée au médecin ; l’importance de la relation médecin-patient, pour l’optimisation des stratégies de prise en charge et enfin, le positionnement du patient en tant qu’acteur, dans la stratégie de prise en charge.
Qu’est-ce que le rhumatisme psoriasique ?
« Il s’agit d’un rhumatisme inflammatoire chronique, qui est associé au psoriasis cutané ou unguéal (qui touche l’ongle). Il peut survenir chez des patients qui ont déjà un psoriasis cutané, dans environ trois quart des cas, et plus rarement il se manifeste avant le psoriasis cutané, dans moins d’un quart des cas.
Un rhumatisme psoriasique qui débute chez un patient qui n’a pas de psoriasis cutané, est de fait, un peu plus difficile à étiqueter. Quelques mois ou quelques années après se manifeste alors le psoriasis cutané, qui devient un indicateur pour le diagnostic de rhumatisme psoriasique. Aussi, si certains membres de la famille présentent un psoriasis, cela peut être un indicateur de diagnostic ».
Comment soigne-t-on le rhumatisme psoriasique ?
« On le soigne, en coordination avec la prise en charge dermatologique ; en effet, dans de nombreuses situations, il faut qu’il y ait une concertation entre le rhumatologue et le dermatologue, sur la meilleure attitude à avoir en terme de prise en charge globale pour le patient.
Si le psoriasis cutané est peu important alors que le rhumatisme est actif, seront utilisés en première ligne des AINS (Anti-Inflammatoires Non Stéroïdiens), et éventuellement s’il y a des articulations gonflées, des infiltrations. Si cela ne fonctionne pas, sera généralement utilisé en deuxième ligne le méthotrexate en traitement de fond, qui va également agir sur le psoriasis cutané. S’il n’y a toujours pas d’efficacité, on utilisera le plus souvent, en troisième ligne, un biomédicament. »
A savoir ! Un biomédicament est un médicament conçu à partir d’une source biologique, c’est-à-dire une substance issue du vivant.
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Peut-on faire face à des situations dites « d’errance diagnostique » ?
« Chez certains patients, il y a clairement un retard diagnostique. Pourquoi ? En premier lieu, le patient lui-même, ne pense pas forcément à un rhumatisme psoriasique s’il a mal au dos, ou aux articulations et ne vas donc pas se plaindre de ses douleurs à son généraliste ou à son dermatologue.
En second lieu, il faut s’assurer que l’interrogatoire réalisé par le généraliste ou par le dermatologue aborde la question des douleurs articulaires de façon régulière, et que le médecin prête attention aux douleurs ressenties dans les articulations des doigts, des orteils, des talons et du dos. Si le médecin n’identifie pas ces symptômes assez vite, il peut en effet y avoir un retard de diagnostic. »
Qu’est-ce qui devrait être fait pour améliorer cette situation ?
« L’éducation des généralistes et dermatologues, est importante, ils doivent avoir le réflexe de penser à cette maladie. La formation des rhumatologues joue également un rôle, afin d’apprendre à utiliser en troisième ou quatrième ligne et au-delà les tous derniers traitements qui existent pour cette maladie: on peut citer l’apremilast, un traitement par voie orale, et les biomédicaments (anticorps anti IL 12-23 et anti IL 17). »
Quelle synergie entre dermatologues et rhumatologues pour optimiser la détection de cette forme de la maladie ?
« On peut envisager des questionnaires simples à remettre aux dermatologues pour détecter simplement un probable rhumatisme psoriasique et adresser le patient au rhumatologue. Un certain nombre de questionnaires sont actuellement en cours de développement au niveau international, ce qui devrait aboutir à un questionnaire final, qui aiderait à détecter de façon optimale cette maladie.
Une diffusion large de ce type de questionnaires auprès des généralistes et dermatologues pourrait aider au diagnostic plus précoce du rhumatisme psoriasique ».
Quels conseils donner aux patients concernant leur traitement ?
« De bien prendre leur traitement et de rapporter les effets (bénéfices, effets secondaires et inconvénients) à leur médecin. Le médecin pourra ainsi faire les meilleurs choix avec eux et optimiser le traitement. »
Quels messages souhaitez-vous adresser aux patients ?
« Pour les patients atteints de psoriasis cutané, si vous avez mal aux articulations, cela peut être un rhumatisme lié à votre problème de peau, il faut donc en parler à votre dermatologue ou à votre généraliste.
Pour les patients ayant un rhumatisme psoriasique connu, il y a des possibilités thérapeutiques importantes. Afin de bien choisir parmi les différents traitements possibles, il faut que le patient s’implique dans la relation avec son rhumatologue, qu’il soit dans l’échange, afin d’obtenir le traitement qui lui convienne le mieux. »
L’échange entre patient et médecin occupe donc une place centrale pour la prise en charge optimale de la maladie. Santé Sur le Net encourage les patients psoriasiques à se documenter et à échanger tout au long de leur prise en charge avec leur médecin, pour adapter au mieux les traitements, au fil du temps.
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Interview menée par Yasmine Z., Journaliste Scientifique.
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