Personnes vivant avec le VIH dans les pays occidentaux : près de la moitié de la surmortalité n’est pas liée au sida

Par |Publié le : 5 décembre 2024|Dernière mise à jour : 5 décembre 2024|5 min de lecture|

En 2023, dans le monde, 39,9 millions de personnes vivaient avec le VIH et 630 000 personnes sont décédées de maladies liées au sida cette même année. Des travaux scientifiques récents suggèrent que grâce à une couverture élevée en thérapie antirétrovirale, une part croissante de la surmortalité parmi les personnes vivant avec le VIH n’est pas liée au sida. Une étude vient de faire le point sur le sujet.

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Quelques chiffres sur le VIH et le sida

Depuis 2010, les nouvelles contaminations au VIH ont reculé de 39 %, passant de 2,1 millions à 1,3 million en 2023. Toutefois, ce chiffre est loin de correspondre à l’objectif 2025, selon la stratégie mondiale de lutte contre le sida de l’ONU, qui est de ne pas dépasser 370 000 nouvelles contaminations par an.

Parmi les 39,9 millions de personnes vivant avec le VIH dans le monde en 2023, on estime que 30,7 millions de personnes avaient accès à une thérapie antirétrovirale en 2023, soit 77%. En 2010, seulement 7,7 millions avaient accès à ce type de traitement.

À savoir ! Les antirétroviraux sont des médicaments destinés à limiter la multiplication du virus dans l’organisme. Ils permettent aujourd’hui d’obtenir généralement une rémission des patients, c’est-à-dire un contrôle de la maladie, avec une charge virale indétectable dans le sang (le virus peut rester présent dans certaines cellules immunitaires et se réactiver). Les traitements antirétroviraux actuels sont des trithérapies, qui associent trois médicaments ciblant le virus.

En 2023, environ 630 000 personnes sont décédées de maladies opportunistes dans le monde contre 2,1 millions en 2004 et 1,3 million en 2010. Pour plus de détail, soulignons que la mortalité liée au sida a diminué de 56 % chez les femmes et les filles et de 47 % chez les hommes et les garçons depuis 2010.

À savoir ! Les affections opportunistes les plus fréquentes sont : la pneumocystose pulmonaire, la tuberculose, les infections à cytomégalovirus (CMV), la candidose œsophagienne puis la toxoplasmose cérébrale.

L’objectif 2025 est fixé à moins de 250 000 décès par an.

Quantifier la surmortalité liée au VIH

Dans la stratégie de diminuer la mortalité liée au sida, il est nécessaire d’estimer précisément, les causes de décès chez les personnes vivants avec le VIH. Leur décès était-il lié au sida ou à une autre maladie, notamment liée au vieillissement ?

Partant de ce constat, une équipe de chercheurs, dirigée par Leigh Johnson du centre de recherche en maladies infectieuses de l’Université de Cap Town en Afrique du Sud, a passé en revue 4485 études intégrant des personnes vivant avec le VIH et dont la plupart étaient sous traitement antirétroviraux.  Parmi elles, 8 ont été retenues. Elles provenaient toutes de pays à revenus élevés : cinq d’Europe centrale et de l’Ouest, une du Canada, une du Japon et une en Corée du Sud.

Leur méthodologie ? Analyser les données sur les taux de mortalité liée au sida parmi les adultes vivant avec le VIH et les taux de mortalité toutes causes confondues appariés par âge parmi les personnes sans VIH. En comparant ces données, ils ont ainsi pu calculer la proportion de surmortalité liée au sida dans les populations de personnes vivant avec le VIH.

Au total, 1 331 742 années de vie et 17 471 de décès toutes causes ont été inclus chez les personnes vivant avec le VIH, soit un taux de mortalité de 13,1 pour 1 000 personnes-années.

À savoir ! En épidémiologie, la personne-année est une unité de mesure des personnes-temps. Cette unité de mesure est utilisée pour calculer le taux d’incidence d’une maladie.

Parmi ces décès, 44% (7721) étaient liés au sida, soit un taux de mortalité global lié au sida de 5,8 pour 1 000 personnes-années.

Dans la population générale, ce taux de mortalité globale est de 2,8 pour 1 000 personnes-années.

En comparant ces données de taux de mortalité globale, il apparait alors que la surmortalité attribuable au sida est de 52 % en Europe occidentale et centrale et en Amérique du Nord contre 71 % dans la région Asie-Pacifique.

Contre toutes attentes, les chercheurs ont mis en évidence que pratiquement la moitié de la surmortalité chez les personnes vivant avec le VIH dans les régions occidentales n’était pas liée au sida.

Les recommandations pour faire reculer la surmortalité liée au VIH

Dans les implications de cette étude, parues dans le Journal International Aids Society, l’équipe de Leigh Johnson rappelle que les antirétroviraux réduisent de manière indéniable la part de décès dus au sida. Cependant, la surmortalité chez les personnes vivant avec le VIH indique forcément que les autres causes de mortalité ne sont pas prises en charge adéquatement.

« Notre étude souligne qu’il est nécessaire de changer de mentalité pour ne plus considérer la surmortalité des personnes vivant avec le VIH comme étant entièrement due au sida, mais plutôt à des causes apparemment sans rapport avec le sida. Il existe de multiples raisons potentielles pour lesquelles la moitié de la surmortalité des personnes vivant avec le VIH dans les pays à revenu élevé n’est pas liée au sida, notamment le fait qu’elles présentent des taux plus élevés de comorbidités comme le cancer et une consommation plus élevée de substances psychoactives comme l’alcool et les drogues » soulignent les auteurs.

Sur le point des stratégies de dépistage, les auteurs précisent qu’il est nécessaire de les renforcer, car un risque élevé de comorbidités non liées au sida est souvent observé chez les individus initiant leur traitement antirétroviral tardivement.

Sources
– VIH : la moitié de la surmortalité encore due au sida en Europe centrale et de l’Ouest. www.lequotidiendumedecin.fr. Consulté le 25 novembre 2024.

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Julie P.
Journaliste scientifique
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